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vendredi 13 avril 2018

Un si terrible secret - Evelyne Brisou-Pellen

J'aime à peu près tous les romans d'Evelyne Brisou-Pellen, et si je l'ai découverte il y a TRÈS longtemps avec du fantastique, Le mystère de la nuit des pierres, (tiens, il faudrait que je le relise, je ne m'en souviens absolument pas) j'apprécie particulièrement ceux qui traitent de vie actuelle, de secrets de famille. 
Et côté secret de famille, ici, c'est plutôt énorme.

L’ayant ressorti pour ma petite-fille, j'en ai profité pour m'y replonger.

Curieusement, je ne me souvenais que de la scène initiale ; et en en parlant avec ma fille, je me suis aperçue que pour elle, c'était la scène finale qui l'avait marquée. La mémoire des lectures est curieuse.
15 ans après ma première lecture, je l'ai tout autant apprécié, mais attention, ce n'est pas un livre léger, il est à réserver aux lecteurs pas trop jeunes, ou pas trop impressionnables.
Il est d'autant plus intéressant qu'il permet de découvrir la période de la seconde guerre mondiale, l'occupation et la Résistance.

Tout commence par un drame terrible, la nuit de Noël, Nathanaëlle apprend que ses grands-parents, couple modèle adorable, viennent d'être découverts morts, de façon totalement inexplicable.
Enquête, deuil, rien ne s'éclaircit.

Jusqu'à ce que la jeune narratrice (15 ans) se retrouve par hasard seule et décide d'aller voir de plus près la maison de ses grands-parents, pour percer ce terrible mystère qui reste entier.
Entre le journal intime de sa grand-mère, et quelques rencontres, elle va de découverte en découverte, à travers la vie pas si lisse que ça de ses grands-parents.
Une découverte intéressante de la vie sous l'occupation, des rapports entre les gens.
Tout ça explique beaucoup de choses, mais n'éclaire pas la fin dramatique des aïeuls.
Et puis, au tout dernier moment, alors qu'elle se résout à repartir sans la clé de l’énigme ...

En tant qu'adulte, j'ai été pas mal perturbée par le fait que la jeune fille devra garder pour elle, toute sa vie, ce qu'elle a appris, sans pouvoir le confier à personne. Comment se construire avec ça ? (Peut-être pour ça que ma fille, qui l'avait lu adolescente, se souvenait de la fin justement)
Et même si ce n'est pas explicité, un beau questionnement sur le fait de se libérer du poids d'un secret en le révélant, au risque de démolir la vie des personnes en face.

Extraits :

Prologue :
J'ai mis le dernier point sur le vieux cahier. C'est fini. Je ne sais pas comment j'ai fait pour aller jusqu'au bout. Maintenant, je suis sûre que je ne serais plus capable de raconter cette histoire terrible. Heureusement, je n'aurai plus à le faire. Elle dort là, sur le cahier d'écolier jauni que j'ai trouvé au fond de la malle, et je vais l'enfermer dans le coffret en bois, que je vais enfermer dans la valise d'osier, que je vais enfermer dans la malle, que je vais enfermer dans le placard du grenier, au fond de la mémoire de la Maison, au fond du temps.

***

On pouvait être milicien et "gentil garçon", "bon père" et "le meilleur des hommes". Un jour, Pilou m'avait dit : "On ne peut pas tenir rigueur à un homme toute sa vie de ce qu'il a fait à vingt ans. Il est peut-être le premier à le regretter." Il parlait alors d'un homme qui était en prison pour hold-up, mais je comprenais maintenant qu'il parlait aussi pour lui. Et puis, comment juger ? Si j'avais vécu à cette époque, comment aurais-je réagi ?
Je me souvins opportunément de l'expression de maman : "C'est toujours facile de savoir après coup ce qu'il aurait fallu faire."

***

En tout cas, il n'a pas survécu à cela. Moi, j'ai survécu. Je ne sais pas pourquoi ... Je crois que les femmes sont plus fortes. J'aurais voulu ne pas être aussi forte, parce que si j'étais morte alors, cela m'aurait évité ces souffrances atroces.
[...]
Oui, les femmes sont trop résistantes, elles peuvent supporter sans mourir une douleur insupportable, c'est ça qui est affreux...


Rageot 2004
Collection Métis 123 pages
Résumé Babelio



1 commentaire:

  1. Je n'ai pas lu ce livre, mais je comprends que ce soit perturbant de savoir qu'elle ne pourra partager ce secret.

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