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jeudi 3 mars 2022

Bobards et compagnie, chez la famille Alonzi - Faustina Fiore

Un roman hilarant autour d'une médiathèque.
Des personnages sympathiques, souvent un brin foufous. Des jeux de mots sur chaque nom de famille. Une fratrie très soudée quoique avec des personnalités fort différentes, et tous assez déjantés, de la grand-mère au petit dernier, fort justement surnommé l'Alien. Qui zozote de façon très attendrissante mais qui a un QI qui dépasse apparemment le total de ses frères et sœurs, et une morale voisine de zéro.

La famille Alonzi est catastrophée : le nouveau maire, poussé par des promoteurs immobiliers, a décidé de démolir la médiathèque. Chacun dans la famille s'inquiète de ce qu'il va y perdre : emprunt de livres, de jeux, de BD ou de jeux vidéos.
Seule solution envisageable, gagner de l'argent pour remplacer les emprunts impossibles par des achats. Mais pour un enfant, gagner de l'argent n'est pas une solution facile.
Heureusement, la fratrie est pleine d'idée et de talents variés, dont inventivité et mensonges formidablement mis en scène.
La grand-mère, elle, envisage plutôt des manifestations pour faire céder la mairie. Et tout le village ou presque étant passé par sa classe, elle garde ses réflexes d'institutrice et de directrice, ça marche à la baguette (à la règle plutôt !!)

Chaque personnage est inénarrable, le Maire, complètement dépassé et qui ne veut que la tranquillité, et écouter le dernier qui parle, la coiffeuse, qui comprend toujours de travers ce que zozote l'Alien, la secrétaire de mairie, aux prises avec les tables de multiplication et terrifiée par son ancienne directrice ...
Avec en prime un narrateur extérieur auquel on ne prête pas forcément attention jusqu'à ce que ...

Quand on retrouve dans la médiathèque les victimes de Bobards et compagnie, chacun recherchant le document qui doit sûrement exister, joli coup d'éclat !!
Et j'avoue avoir pleuré de rire à la dernière trouvaille de l'Alien

Un roman pétillant, plein de bonnes idées aussi, malgré ce qu'il y parait. Un régal.
Mon seul reproche est que je n'ai pas réussi à mettre la version numérique sur ma liseuse, d'où mon retard pour le lire, car ce n'est vraiment pas pratique.

Présentation de la famille et des lieux (par l'autrice) :

la fratrie Alonzi se compose de :
- Frédéric, 17 ans, champion de la glandouille et de tous les jeux vidéo qu’il peut emprunter à la médiathèque (j’y reviendrai). Un mètre quatre-vingt-cinq, une grosse voix d’homme, mais encore capable de s’écrouler de rire devant Winnie l’ourson.
- Marianne, 14 ans, longs cheveux noirs, première de la classe alors qu’elle a deux ans d’avance, toujours le nez dans un bouquin.
- Léa, 10 ans, pleine de frisettes, impatiente de grandir, une liste de copines longue comme le bras (de Frédéric).
- Théo, son frère jumeau, 9 ans², une boule de muscles, tellement d’énergie à dépenser que si on le mettait dans une turbine et qu’on le faisait courir, on aurait sans doute de quoi fournir en électricité toute notre petite ville de Cannelle.
- L’Alien, 7 ans, William de son vrai prénom. Boucles blondes, peau veloutée, grands yeux, longs cils, délicieusement potelé… On dirait un ange. (J’ai bien dit « on dirait ».)

***
Cannelle, donc. Trois mille habitants, deux supermarchés, quatre boulangeries, une grosse école primaire, un collège-lycée, une petite librairie-papeterie-souvenirs-cadeaux-presse, cinq salons de coiffure (oui, moi aussi ça m’étonne) et une médiathèque.
La médiathèque, c’est un gros bâtiment en béton très moche, de cinq étages, avec… des livres, bien sûr, beaucoup de livres, mais aussi des revues et journaux, des CD, une très belle collection de DVD, un grand nombre de jeux vidéo ainsi qu’une douzaine d’ordinateurs à disposition du public, et même plein de jeux de société et de jouets dans la partie ludothèque.

***
— Ou alors : « Le mensonze est le seul privilèze qui distingue l’homme de tous les autres organismes » ?
Tout le monde regarde l’Alien. [7 ans !!]
(Je sais, je me répète, mais qu’est-ce que j’y peux, si ça arrive tout le temps ?)
— Où diable es-tu allé chercher ça ? l’interroge Marianne.
— C’est une phrase que z’ai lue dans un bouquin rigolo que z’ai trouvé dans ta ssambre.
Marianne se rappelle soudain avoir cherché en vain plusieurs jours de suite Crime et Châtiment avant qu’il réapparaisse sur sa table de chevet, mais elle décide d’enchaîner :
— Et si on mettait tout simplement « Bobards et Cie – Parce qu’un bon mensonge peut vous sauver la vie » ?
Tout le monde approuve. Adopté.
[…]
— Non, z’ai vraiment fait pipi sur mon lit tout à l’heure, parce que ze lisais Les Souffrances du zeune Werther et ça m’a fait trop rigoler.

Et d'autres extraits : 

- Et toi, l’Alien, qu’est-ce que tu voudrais ?
- Moi ze voudrais un doudou tout mignon pour le câliner, et aussi une bombe atomique.

***
- Moi, ze sais qui c’est, déclare l’Alien à la surprise générale. Des promoteurs immobiliers.
Du haut du lustre auquel il s’est suspendu, Théo s’étonne :
- Comment tu sais ça, l’Alien ?
- C’est facile : ils ont des costumes anthracite et une mine torve, voire patibulaire. Donc, c’est forcément les méssants de l’histoire.
Il y a un gros blanc. L’Alien ajoute :
- Et aussi, il y a écrit « ImmoProm » sur leurs fissiers.
- Sur leurs fessiers ? s’étonne la coiffeuse à mi-voix.
- Non, il veut dire « fichiers », traduit Léa.

***
- Eh bien, voyons : il faudra environ neuf semaines pour vider le bâtiment… Quatre semaines pour déposer la demande de permis de démolir… Huit semaines pour la réponse de la commission d’urbanisme du département… Neuf semaines pour l’instruction de la demande… Deux semaines pour sécuriser les abords du site… Et bien sûr, les trois semaines de retard réglementaire. Ça fait combien, Nathalie ?
Nathalie se met à pleurer. Mamie la rassure :
- Ne t’inquiète pas pour moi, Nathalie, je ne resterai pas ici pendant tout ce temps.
- C’est pas ça… sanglote la jeune femme. Mais maîtresse… Je veux dire, madame… Vous m’aviez dit de réviser mes tables de multiplication… pas mes additions !
- Ça fait trente-cinq semaines, annonce Marianne.
- Deux cent quarante-cinq zours, dit l’Alien. Cinq mille huit cent quatre-vingts heures. Mais elle sera morte et déssessée avant.
- Des fessées ? s’étonne la coiffeuse.
- Desséchée, traduit Léa.

***
- Quarante-neuf ! intervient Nathalie. Sept fois sept, ça fait quarante-neuf jours !
Elle a l’air si fière d’elle que Léa l’applaudit, et mamie sourit :
- C’est bien, Nathalie. Dix sur dix. Tu pourras rester à ton poste et devenir ma secrétaire, si tu veux.
- Oh, merci maîtresse, je veux dire madame, je veux dire madame la maire !
- Je pense que tu ferais mieux de t’habituer dès maintenant à m’appeler par mon prénom : Élisabeth.
- Oui, ce sera plus rapide que « maîtresse-je-veux-dire-madame-je-veux-dire-madame-la-maire »

Illustrations : Grégory Elbaz
Éditeur : Poulpe Fictions - 27 janvier 2022
Dès 8 ans, 151 pages, 9.95 €
Lu en numérique via NetGalley que je remercie.

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