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vendredi 6 janvier 2023

L'Héritage de Violette Pinkerton - Sandrine Biyi

 
Gros coup de coeur pour ce roman.
J'ai déjà lu d'autres histoires mettant en scène ces valeureuses institutrices du début du siècle passé, mais celle-ci m'a particulièrement accrochée. Par son écriture agréable, sa bienveillance, son empathie, ses personnages.

Violette Pinkerton a une forte personnalité, et elle est assez atypique dans le monde de ces nouvelles recrues de la République, car issue du milieu viticole bordelais, d'une famille d'un niveau social élevé.
Ce qui ne l'empêche pas d'être à l'aise à la campagne, et de s'adapter avec brio. Malgré tout ce qu'on va mettre en travers de son chemin.
On retrouve la rivalité entre l'église et la mairie, sujet connu, mais on y apprend aussi qu'ouvrir une école laïque pour les filles relève du choix et de la décision du Maire. Même pour présenter des élèves au Certificat d'Études, c'est lui qui doit donner son aval.

L'histoire de Violette nous est ici contée par elle-même près de soixante-dix ans plus tard.
En 1981, à quatre-vingt treize ans, plutôt que de partir en maison de retraite, elle se rend aux arguments de son médecin, dont elle est très proche depuis si longtemps, et prend chez elle une colocataire, qui se prépare à devenir institutrice.
Un vrai lien se noue entre elles, et les inquiétudes de Sasha lui rappellent sa première classe, en 1912.
Et l'incitent à se mettre, en cachette, à écrire ses souvenirs de cette année-là.
Et c'est terriblement prenant. Je n'aurais plus voulu quitter Violette, Rose, Marie, Jeanne. Et même André.

Violette arrive, toute fraîche émoulue de sa formation, dans un village très divisé quant à l'utilité de faire étudier les filles. Entre ceux qui regrettent l'argent que payaient les parents des filles fortunées pour suivre l'enseignement de monsieur le curé, et ceux qui estiment que moins elle en sait, plus une femme sera docile et restera "à sa place" aux travaux de la maison et de la ferme, les "progressistes" ont fort à faire pour s'imposer.
Le Maire, s'il a pris la décision d'ouvrir une école laïque de filles, le fait sans doute plus en vue de sa carrière politique que pour leur émancipation. Quant à sa femme ...
La famille qui héberge la jeune institutrice est d'abord assez angoissée, une fille de la ville, instruite. Va-t-elle les prendre de haut ? Va-t-elle donner des idées communistes à leur fille ? 

J'ai aimé ces personnages, plus complexes qu'il n'y parait. J'ai aimé qu'il soit question avec beaucoup de bienveillance de ceux qui n'ont pas la chance de pouvoir s'assoir sur les bancs de l'école, de celles qui  sont moquées parce que leur famille est trop pauvre.
Un roman qui fait vraiment du bien, tout en nous dévoilant une part de notre passé proche qu'on a souvent oubliée.

La fin nous fait mieux comprendre le parcours des personnages, qu'on retrouve avec étonnement, ou avec le sourire (selon que notre lecture a été plus ou moins attentive !!)

Je dois avouer que j'ai hésité à demander ce roman, ayant eu quelques déceptions avec des livres édités par Librinova. Comme j'ai peu de temps et beaucoup de livres que je veux lire, j'essaie d'aller vers ce qui m'attire vraiment. Le sujet m' intéressait, j'ai bien fait.
J'ai dévoré avec bonheur cette chronique des temps anciens, pas si lointains que ça et qui pourtant nous paraissent si éloignés.

Extraits :

Pourtant, la réalité s'imposait, crue, nue, blafarde. La République ne voulait plus payer pour l'Église et avait décidé de la laïcité. Plus de religion dans les classes mais des leçons de morale, d'hygiène et même de couture et de cuisine, pour les filles. Les villages devaient se doter d'institutrices, ça aussi c'était nouveau et parfaitement incongru.

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Il professait encore comme un vrai médecin de campagne. Il n'était pas un de ces jeunes coqs tout frais émoulus de la faculté, rechignant à se déplacer sauf si vous étiez à l'article de la mort. Là, ils n'avaient pas le choix, et encore ...

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Si on la laisse agir, vous verrez qu’elle présentera les filles au certificat d’études comme cela se fait déjà dans les grandes villes. Et pourquoi faire ? Des malheureuses sans mari, car une femme savante les fait fuir. Nous sommes en campagne ici. Qui tiendra les fermes ? Réfléchissez bien, monsieur le maire.

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- Bonjour mesdemoiselles. Je me nomme mademoiselle Pinkerton et je suis votre institutrice. Je vous enseignerai, cette année, le calcul, l’orthographe, l’histoire et la géographie. Vous aurez une dictée tous les matins. L’après-midi sera réservé aux cours de couture et de dessins…

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Éditeur : Librinova / Savine Dewilde - 15 octobre 2022
288 pages ; 20.00 €
Lu en numérique via NetGalley que je remercie







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