dimanche 25 juin 2023

Les Humanimaux : L'intégrale - Éric Simard

Un recueil qui permet de se plonger dans la totalité des histoires des humanimaux, ces enfants génétiquement modifiés, pour les soigner à partir de gènes d'animaux.
J'avais lu il y a longtemps L'Enfaon, qui ne semblait alors pas destiné à faire partie d'une série.
Puis, d'autres titres sont venus rejoindre L'Enfaon, tous parus dans la formidable collection Mini Soon de Syros, qui permet d'aborder la science-fiction avec les plus jeunes, ou les petits lecteurs. 
Tous écrit par le même auteur. On y retrouve donc à la fois des personnages d'un volume à l'autre, mais aussi le même état d'esprit, la même bienveillance, la même empathie vis à vis de ces enfants qui souffrent tous de leurs différences. 
J'avais juste regretté (mais c'est un détail) que l'originalité du premier titre (l'enfaon se prononce comme l'enfant) ne puisse être reconduit sur les suivants.

Ce recueil rassemble huit titres déjà parus, plus un inédit, l'Enrequin.
Mais pas l'endauphin, pourquoi ?
Tous entre 35 et 40 pages. Il nous permet de nous immerger dans le CHGM (Centre des Humains Génétiquement Modifiés) et de vivre le quotidien de ces enfants.

L'Enlouve
J'étais surprise que le recueil ne commence pas par L'Enfaon. En fait, c'est pour respecter un ordre chronologique avec la présence d'un humanimal qui, hélas, ne sera plus dans les suivants.
L'enlouve aimerait tellement s'occuper de bébés, c'est sa vocation. Mais confier des tout-petits à quelqu'un qui a des gênes de loup, qui oserait ?
On croise ici d'autres humanimaux, enchien, enpoule... De futurs nouveaux titres ?

L'Enfaon
Une tendresse particulière pour cet Enfaon, qui nous a fait découvrir ce monde. Et qui arrive dans une classe "normale" où, comme nous, les enfants vont découvrir l'existence de ces humanimaux.
On va a aussi tristement y croiser l'enfanteau, trop proche de l'éléphant dont il a les gênes.

L'Engourou
Quoi de mieux quand on a des gênes de kangourou que de jouer au basket ? Mais ici aussi, sa différence ennuie. Essayer de l'intégrer par le biais du sport pourrait être une bonne idée. Ou pas ?

L'Enperroquet
Un texte assez différent des autres, il y a plus d'action, et du suspense. Et aussi un beau jeu sur les mots.
L'enperroquet a une particularité navrante pour la vie en société, puisqu'il répète toujours la fin des paroles qu'on lui dit. Ça lui cause bien des ennuis. Et l'auteur, par un joli jeu de vocabulaire, a fait en sorte que chaque fin de phrase répétée change totalement le sens de ce qu'il voulait dire. Ça donne de belles idées d'exercices amusants à faire !

L'Enbeille
Encore une  transformation pas très réussie, car l'enbeille est vite dangereuse pour ses amis, et donc tenue à l'écart. Elle va croiser l'enlézard, qui aime la chaleur comme elle, et qui en a encore plus besoin.

L'Encygne
Lui ne vit plus au CHGM. Nous le découvrons dans les Alpes, au pied du Mont Blanc, et sa mère adoptive vient de mourir, le laissant bien désemparé avec ses différences. Il rencontre l'endelle, avec des gènes d'hirondelle.

L'Enserpent
Ce texte a été écrit en lien avec des classes de CM1, dans le cadre du feuilleton des Incos.
D'autant plus intéressant qu'il nous parle d'un enfant qui a reçu les gènes d'un animal bien peu apprécié des humains, contrairement aux précédents. Ici, ce n'est pas seulement la différence qui gêne, mais ce qu'il est. 
En outre, c'est vu par une fillette qui elle-même souffre d'une différence, même si elle est nettement moins importante, mais très visible.

L'Enbaleine
L'enbaleine nous parle de l'endauphin (dont on ne retrouve pas l'histoire ici, et aussi de l'enrequin, de l'entruite, de l'enraie.
Elle cherche à savoir d'où elle vient, qui sont ses parents.
Cette fois, plus qu'un plaidoyer pour les différences, c'est d'une quête d'identité dont il est question. 
L'enbaleine, enfermée dans le centre, rêve à la fois de l'eau, et de ses parents.

L'Enrequin
Contrairement aux précédents, cet épisode est inédit.
On va rencontrer aussi l'enpieuvre, et l'enthon !
L'enrequin a des problèmes encore plus grave que se faire accepter avec ses différences. Car il sait qu'il est dangereux, et ne peut se maîtriser, il se fait donc peur lui-même. 

Je n'en dis pas plus, pour ne pas trop en dévoiler.
Tous de très beaux textes, un peu tristes souvent. 
On comprend que c'est pour sauver ces enfants qu'on les a ainsi modifiés. Mais leur différence les rend fragiles face à la vie en société.
Et qu'ils soient pour la plupart enfermés dans le centre sans autorisation d'en sortir est terrible.
Tous nous apportent une belle réflexion sur les différences et des occasions de lancer des discussions intéressantes avec les enfants.

Éric Simard préfère parler d'émoscience plutôt que de science-fiction. Un bien joli terme...
Car oui, à part la création de ces êtres, qui n'est pas détaillée, on est plus dans l'émotion que dans la science.

Qui en parle ? Ramettes

Extraits :

L'Enfaon, p 55 :
Je ne comprends pas vos calculs, maîtresse. Pour vous, par exemple, 1 + 1 font 2. Pour moi, 1 + 1 font 1. Ça fera toujours 1.
- Tu te trompes, a répondu la maîtresse. 1 + 1 font 2.
L’enfaon a pivoté sur sa chaise et a répliqué :
Je suis un mélange d’humain et de cerf, deux espèces différentes. Et pourtant je suis 1. Vous voyez bien que 1 + 1 font 1. Je sais que c’est difficile pour vous, maîtresse, de comprendre. Vous essayez de m’aimer tel que je suis. C’est pour ça que je reste ici. Uniquement pour ça. Mais si vous m’obligez à voir le monde comme vous le voyez, je partirai.

***
L'engourou, p 102
Il m'avait mis en face de mes responsabilités. Personne ne m'avait parlé comme ça avant lui. Il s'était adressé à moi comme un père à son fils :avec exigence et justesse.

***
L'encygne, p 231
Il nous arrive de nous épuiser dans des prises de bec inutiles. Nous nous volons aussi de temps en temps dans les plumes

***
L'enserpent, p 235
Je pourrais être jolie si je n'avais pas cette "tache de naissance" qui couvre toute ma joue gauche [...] Les seuls qui m'acceptent spontanément, ce sont les jeunes enfants. Quand ils découvrent mon visage, ils me demandent simplement :"Tu as sali ta joue ?"


Éditeur : Syros - 1er juin 2023
La très belle illustration de couverture est de Prince Gigi.
344 pages - 16.00 €
À partir de 8 ans.











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