mardi 20 septembre 2022

Riposte - Louisa Reid

 
Un texte superbe, dur mais si important.
J'ai eu un peu de mal à y entrer (j'aime qu'on "m'explique" un peu ce qui se passe !!) mais ensuite, je ne l'ai pas lâché.
Lily est grosse, et on ne le lui laisse pas oublier. Un harcèlement qui va très loin dans la violence, physique comme verbale.
Son père l'incite à apprendre à se défendre, et lui fait découvrir la boxe, qu'il a lui-même pratiqué.
Sa mère s'inquiète pour elle, c'est une mère ! À cause du harcèlement, mais aussi à cause de la violence de la boxe. Elles s'aiment toutes les deux. Mais Lily a du mal à supporter que sa mère, licenciée parce que trop grosse, ne sorte plus et n'essaie plus du tout de lutter.
Chacune va faire du chemin au cours de ce roman, et une belle évolution.

La narratrice est Lily, tout en vers libres, avec des jeux de caractères et de lignes.
En contrepoint, il y a aussi les mots de sa mère.

Tout à fait par hasard, j'enchaîne les romans sur le harcèlement en ce moment. Trois lus presque d'affilée. Tous aussi passionnants quoique fort différents. Le sujet est hélas d'actualité.
Comme dans "Tout ira bien", le salut passe ici par la boxe, et je dois dire que ça me met mal à l'aise.
La boxe, un moyen de se défendre, certes. Mais c'est surtout un sport qui fait mal, qui abîme. Et où on se défoule, on tape même sur ceux qu'on apprécie, comme ici. 
Comme je comprends la mère de Lily, qui n'a pas envie de voir sa fille se faire mettre en sang, peut-être avoir des dommages irréversibles au visage.

Alors certes, ce roman est extraordinaire, on aime voir Lily évoluer, cesser d'être une victime et arriver enfin à tenir tête à son agresseur.
Mais j'avoue avoir préféré Des bleus au cartable, où on refuse la solution voulue par le frère, violence contre violence. Alors que la situation se dénoue autrement, plus positivement. Il est vrai que le contexte est différent.

Je m'interroge sur cette mode de romans adolescents en vers. Il me semble qu'il en paraît de plus en plus.
C'est beau, c'est poétique, c'est original, enfin ça l'était au début ! 
Sauf que, chaque fois que je propose un tel roman à de jeunes lectrices (je n'ai que des filles dans le lectorat adolescent autour de moi, famille comme bibliothèque), elles ouvrent le livre, et en général, une fois qu'elles voient que ce sont des vers, elles le reposent. Aucune ne semble attirée.
Pourtant, s'il parait autant de livres de ce genre, c'est qu'ils doivent être lus ?

À la fin un court dossier sur le harcèlement scolaire, avec les numéros et liens à contacter si besoin.

Extraits :

'gro     sso    pho    bie', elle dit,
[...]
elle hoche la tête, 
esquisse un geste vers moi, me cible
moi, quoique très subtilement,
et dit
'ça fait partie de l'évolution, vous voyez, c'est
parfaitement naturel
de penser,
sérieux, je préférerais mourir
que de ressembler à ça.'

***
'ça fait des années,
je sais pas pourquoi j'ai arrêté.  [la boxe]
     ta mère,
ça lui plaisait pas trop.
      - elle disait qu'elle aimait bien ma cervelle là où elle était,
à l'intérieur de ma tête.'

***



Titre original : Gloves off (2019)
Traduit de l'anglais par Clémentine Beauvais
Éditeur : Bayard - 21 septembre 2022
247 pages - 14.90 €



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