jeudi 10 juillet 2025

Hyper - Émilie Chazerand


 Encore un roman fort et prenant d'Émilie Chazerand. Ce ne sera cependant pas mon préféré, car malgré un humour toujours présent, la situation est si sombre.
Un peu trop triste pour moi, mais quel roman extraordinaire. Avec un tel final, c'est une thérapie à lui tout seul.

Difficile d'en dire plus. D'en dire plus que le résumé, qui en dit déjà trop ! (Heureusement, je les lis pour choisir mes lectures, mais je les oublie aussitôt !, je viens de le relire !)

Miriam est mal dans sa peau, mal dans vie, mal dans sa famille, qui se résume à une mère qui ne semble pas se soucier de son mal-être, et qu'elle voudrait détester.
Elle ne s'aime pas, on ne l'aime pas.
Son thérapeute est assez étrange, et elle y va un peu "à reculons". Mais il lui suggère un excellent conseil : écrire chaque jour son journal intime, pendant quatre semaines. Assorti d'un deuxième conseil tout aussi judicieux : un double journal, parce qu'elle sait bien que sa mère n'aura de cesse de le lire.
Et nous avons donc droit aux deux.
Celui tout sucre, tout faux, tout positif, ou presque. Pas trop quand même pour ne pas mettre la puce à l'oreille de sa lectrice.
Et l'autre, le vrai, bien caché, où elle essaie d'exorciser sa violence et sa détestation d'elle-même.

Résumé comme ça, ça pourrait être n'importe quel roman, drôle, loufoque, triste, réaliste. Mais c'est du très grand Chazerand. Qui va au tréfond des choses et des sentiments. Et c'est violent.

Si Miriam est si mal, c'est, semble-t-il, surtout parce que sa petite soeur a disparu il y a bien longtemps. Parce qu'elle est la seule à s'en inquiéter encore, et qu'elle se sent coupable, puisqu'elle a assisté à l'enlèvement.
Et pourtant ...

Extraits :

Pourquoi les promesses qu'on se fait à soi-même sont celles qu'on ne tient jamais ?

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Les silences, c'est des ours : quand c'est petit, c'est adorable. De vraies peluches toutes douces. On oublie que c'est sauvage. Pire : on croit pouvoir les domestiquer... Mais quand ça grandit, que ça se dresse devant vous, les pattes qui griffent l'air et la gueule ouverte, c'est terrifiant.

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C'est fou comme les gens qui devraient aller voir un psy sont les premiers à dire aux autres d'aller voir un psy.

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Y a que les chaînes d'info qui proposent des programmes qui n'ont pas l'air formatés expressément pour les malades mentaux. Sauf qu'elles passent et repassent en boucle les mêmes images et séquences, continuellement, et ça finit par rendre cinglé quand même.

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C'est une drogue socialement admise, le sport. Tout ça parce que ça empêche d'être gros.

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J'ai le droit, non ? Je m'aime pas. Je m'aime plus. Alors je veux juste rompre. C'est ce qu'on conseille à tout le monde, et à tout bout de champ, il me semble. "Si vous êtes avec une personne qui vous humilie, vous rabaisse, vous fait du mal d'une façon ou d'une autre, partez. Quittez-là". Bah voilà. C'est ce que j'ai essayé de faire. C'est tout.

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J'apprends pas, ni de mes erreurs, ni de celles des autres. J'accueille rien en moi, à part de la bouffe et du seum. Je suis vide, je suis creuse, je suis conne. Je suis méchante, aussi, et ça c'est moins pardonnable. J'ai le cœur dur et la peau molle alors que ça devrait être l'inverse. Surtout à mon âge, non? Mais je suis coincée, bloquée.

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Je crois que ce souvenir illustre pas mal notre problème de communication : je parle de suicide, elle parle de trouver des vêtements dans lesquels je ferais "moins grosse". On n'a jamais réellement été sur la même longueur d'onde, elle et moi.

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"Vous avez mieux à faire, peut-être ?" J'ai pensé : "Oui, en effet : mourir. Mais je peux décaler. J'ai la détresse flexible."

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Je peux pas rentrer mes émotions et le ventre. C'est trop d'efforts. Va falloir choisir.

Editeur : PKJ Pocket Jeunesse - 22 mai 2025 - 288 p. - 16.50 €
Lu en numérique via NetGalley que je remercie.


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