Il n'y a sans doute plus grand-chose à en dire, tant il a déjà été commenté et unanimement apprécié.
J'avais en un premier temps renoncé à le lire car il m'était proposé dans une version incompatible avec ma liseuse. Mais vu les critiques toutes élogieuses, je n'ai finalement pas résisté (merci à Isabelle qui a eu beaucoup de mal à me le transférer) Et heureusement, car c'est vraiment une lecture à la fois indispensable, et très agréable à lire.
Étant donné mon âge, je connaissais bien sûr cette période d'enfants uniques en Chine. Mais entre en entendre parler, et découvrir de l'intérieur tout ce que ça induisait, la différence est immense. Car ici, on va vivre avec ces familles, même si le roman se passe de nos jours.
Xinxin (dont le prénom signifie Coeur à coeur) a 15 ans et vit à Pékin (Beijin) avec ses parents et ses grands-parents. Elle est fille unique, comme presque tous autour d'elle. Quand elle apprend que sa meilleure amie va être grande soeur, puisque c'est à présent autorisé (voire encouragé), quoique encore peu courant, elle prend soudain conscience d'un manque dans sa vie, et devine peu à peu que sa famille cache un difficile secret. Et presque au même moment, elle rencontre un garçon, dans une situation dont elle ne soupçonnait même pas l'existence.
Entre découverte des conséquences même tardives de la politique de l'enfant unique, enquête sur sa famille, premiers émois, l'adolescente va traverser une période difficile, éclairée toutefois par ceux qui vont l'aider.
Ce roman nous parle donc de cette drastique limitation des naissances, avec les conséquences dramatiques qui en ont découlé. Je connaissais l'horreur des villages où tant de bébés filles étaient noyées. Mais entendre parler d'enfants "surnuméraires" me parait presque aussi choquant.
Mais aussi d'autres thèmes importants. La place des grands-parents, qui souvent régentent la vie des couples, parce que, à défaut de retraite, ce sont leurs enfants qui leur permettront de vivre leur vieillesse, il faut donc qu'ils prennent les bonnes décisions (pour eux). L'absence d'assurance-maladie et ses conséquences. Et l'adoption, qui me parait un sujet important du roman.
Car parallèlement à Xinxin, nous suivons une autre ado, qui vit en France, dans la belle région de Sète.
Ce roman est extrêmement attachant, et j'ai apprécié qu'au milieu d'un quotidien difficile, il soit suffisamment positif pour que la lecture en soit vraiment agréable et prenante.
C'est le deuxième livre se passant en Asie que je lis ce mois-ci (l'autre est à paraître, j'en parle bientôt).
Je me demande comment on peut entrer dans l'esprit asiatique pour les réactions de personnages et leur mode de pensée.
Je sais bien qu'un auteur est par définition quelqu'un qui travaille avec son imagination, qu'on peut écrire sur une période qu'on n'a pas connue ou se mettre dans la peau d'un personnage très éloigné de nous, (je ne veux surtout pas entrer dans la polémique des romans own voice) mais se couler dans la mentalité asiatique me parait vraiment complexe.
Un petit regret concernant la version numérique : il y a souvent des termes chinois, avec la traduction en fin de chapitre et non en bas de page. Et ce n'est pas très pratique pour moi !
Prix des Embouquineurs 2021-22 Catégorie 4e/3e (Décerné par les jeunes lecteurs)
Extraits :
De toute façon, une fois sur mon vélo, j’étais libre comme l’air… pollué ou pas. M’évader sur Crinière d’azur, ça voulait dire vitesse et vent dans les cheveux : j’adorais ça ! Zigzaguer entre les voitures, dont le nombre semblait augmenter au même rythme que les travaux, pourtant censés désengorger la cité, me faisait éprouver un furieux plaisir de liberté. Un petit bonheur qui ne durait que le temps du trajet de chez moi au lycée, mais que je savourais à fond.
***
Dans les années 2000, de nombreux orphelinats ont ouvert pour éviter le pire aux enfants surnuméraires.
***
Cette vaste étendue d’eau, qui s’étirait sur trois lacs, formait le lac Shichahai ; Xihai en était le plus petit, et mon chouchou. Situé au cœur de Pékin, le lieu était hyper-calme. Il s’en dégageait une fraîcheur merveilleuse, et le défilé des minutes y ralentissait comme par miracle.
***
Toutes ces petites filles qui, à peine nées, étaient étouffées ou noyées pour donner une chance à une meilleure naissance.
— Une meilleure naissance ? Qu’est-ce que tu veux…
Mais je n’avais pas eu besoin de terminer ma phrase. Cette fois-ci, c’étaient les paroles de Xia qui affluaient dans mon cerveau.
— Avoir un garçon ? C’est ça ?
— Oui… Dans les provinces reculées, avoir une fille est une calamité, un garçon une bénédiction. Fang-Yin a connu tout ça. Elle y a même participé. Par devoir envers le Parti. Par patriotisme. Pour faire respecter la loi. Parce que c’était son métier.
Éditeur : Slalom - 4 février 2021 - NOUVEAUTÉ
Dès 12 ans - 240 pages - 14.95 €
Lu en numérique via NetGalley que je remercie
Mes autres lectures d'Anne Loyer :
Et le très beau I comme Iris, que je n'ai pas chroniqué.
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