vendredi 2 septembre 2016

Holden, mon frère - Fanny Chiarello

Ecole des Loisirs 2012
Collection Medium 208 pages

Quel régal ce petit roman.
De l'art de faire sourire sur des sujets pas vraiment drôles. Et je peux dire que  j'ai souri presque à chaque page.



Pourtant, le thème ne s'y prête pas vraiment : Kévin est un garçon très malheureux en famille. Des parents plus portés sur la télé que sur les livres, sur la bière et la purée minute que sur les légumes bio. Et qui ne s’occupent de lui que pour le taper, le charger d'un travail, se moquer de lui et de ses prétentions, ou le mettre dehors malgré le froid.
Kévin n'est pas plus heureux au collège, où là aussi il vaut mieux savoir taper que savoir répondre aux questions des profs.
Ce qui hélas semble être souvent le cas.
Pour ne rien arranger, Kévin est assez doué ...surtout pour se mettre justement dans les situations qu'il voudrait éviter :
Trouver comme amie une mamie de choc qui ne jure que par la littérature, et le fait savoir parfois violemment
Se lier avec la fille la plus intello et la plus mal vue de la classe,
Avoir comme meilleur copain la tête de Turc de la classe, bon élève et bègue de surcroît, etc ...

Bref, que du vécu qui fait mal, mais qui ici fait rire aussi.
Il sait aussi nous émouvoir, par exemple dans son désir d'éviter à sa petite soeur tout ce qu'il ne sait pas éviter pour lui.

La fin aussi est émouvante, lorsque les rôles s'inversent, qui aide qui à présent ?

Une belle ode à la lecture, et un bon moment de détente ! Sans doute "trop beau pour être vrai" mais n'est-ce pas le plaisir du roman ?
Dommage que la langue utilisée par certains personnages, langage très soutenu, mis de façon très volontaire pour appeler le sourire du lecteur devant cet excès, risque par contre de rebuter les petits lecteurs, ceux pour qui cette lecture s'avérerait sans doute très positive et encourageante.

Après  "Perdus de vue" de Yaël Hassan et Rachel Hausfater, sur un thème d'ailleurs proche de celui-ci, j'avais décidé de lire cet été L'attrape-coeurs, qu'à ma grande honte je n'ai jamais lu
Il m'attend toujours sur l'étagère, l'été se termine sans que j'en ai trouvé le temps, mais après cette lecture, je ne pourrais décidément pas passer outre !! (J'aurais pu m'en douter au vu du titre, mais ... comme je ne l’ai pas lu, je ne connaissais même pas le nom du héros :-/ ).

Ma note 4 / 5

Extraits :

Avant de partir, nous appelons le serveur pour lui régler nos consommations et je crois avoir mal entendu quand il nous apprend le prix du chocolat. À mon avis, il veut nous faire payer le lave-vaisselle en sus.

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notre fille s'appellerait Constance, elle écrirait sa première thèse avec des pâtes alphabet à l'âge de trois ans, pour se délasser les doigts après le cours de flûte traversière.

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La question est de savoir si je veux être un lâche indemne ou un héros abîmé.

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La bibliothèque, c'est le seul endroit chauffé où il ne faut rien payer, en tout cas dans mon quartier.

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D'abord je me suis limité aux mangas. La série que j'avais commencée comporte quarante-trois volumes, assez pour occuper le reste de mes vacances royales. Mais dès le tome trois, je me suis posé des questions; je me suis dit: "Mon petit Kévin, tu n'es vraiment pas une lumière. Je crois bien que tu es en train de lire cette histoire pour la troisième fois." 
Après vérification, ce n'était pas le cas. "Mon petit Kévin, certaines subtilités doivent t'échapper. Les mangas, c'est trop ardu pour toi." Alors j'ai élaboré un stratagème dont je ne suis pas peu fier: quand j'arrive à quatorze heures, je vais directement chercher Le Grand livre des motos sur son étagère, je l'ouvre en grand et je glisse dedans un album des Schtroumpfs.

***
Drôle d'idée que de lire des romans, quand on y pense bien : on s'attache à des personnages qui n'existent pas, on se sent moins seul alors qu'il suffirait de lever la tête de sa page pour constater qu'on l'est toujours autant dans le vrai monde, et après, tout est fini.

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La honte absolue, cornichon, c’est de tenir un livre à l’envers. Surtout quand on le brandit comme une banderole.


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