vendredi 4 février 2022

Les pieuses combines de Réginald – Thomas Hervouët

Quel régal cette lecture, je me suis beaucoup amusée. Et pourtant, il y a matière à réflexion. 

Je n’aurais jamais pensé demander sur Masse Critique un roman noté « livre religieux ». Mais …
Je venais de lire Sainte Marguerite-Marie et moi et découvert par la même occasion et avec beaucoup de plaisir, les éditions Quasar.
Le visuel m’a tout de suite attiré l’œil, me rappelant ma lecture précédente. Même si je me doutais que l’auteur devait être loin de Clémentine Beauvais, j‘ai eu envie de découvrir plus avant une maison d’édition qui m’intriguait.
Bien m’en a pris, car j’ai vraiment passé un très bon moment avec cette lecture.

Alors oui, on y parle de religion. Mais avec une liberté de ton et un humour qui font du bien.
On y parle même beaucoup de religion, et une bonne partie de l’histoire se déroule à Lourdes en plein pèlerinage. Mais qu’est-ce qu’on rit. Tout en réfléchissant pas mal en fait, et en se posant des questions.

Réginald est notaire (Ben oui, je n’aurais jamais cru qu’un notaire parviendrait à me faire rire en ce moment !). Une famille plutôt tranquille, un cabinet qui tourne bien, juste un peu de difficultés à profiter de samedis tranquilles quand il se trouve à devoir garder ses jeunes voisins, mais rien de grave.
Et voilà que sa vie se complique sérieusement. Côté travail, son étude se retrouve en charge d’un héritage qui va lui poser bien des problèmes. Et en même temps, sa fille adorée, Athénaïs, décide de se fiancer très vite avec un garçon qui ne plait guère aux parents, surtout à sa mère. Entre Jean-Arthur Chambourcy, héritier supposé, et Elton Moulard, amoureux un peu trop à gauche, Réginald a bien du souci à se faire.
Et s’il parvenait à joindre les deux affaires pour s’en tirer au mieux ? Un séjour à Lourdes apporterait-il une solution ? Un miracle peut-être ? Pour Elton il ne saurait en être question, ni même aborder le sujet. Et pourtant, il s’y retrouvera aussi, en même temps que le reste de la famille, et que Jean-Arthur dont peu savent ce qu’il peut bien faire là, mais lui se pose moins de questions.

Dans un monde légèrement uchronique où la guerre (économique ?) est à nos portes, où le président Starky fait face à une opposition représentée par Francis Gouda depuis Tulle, où la Suisse est notre pire danger, on va plus s’amuser que s’inquiéter.
Je serais curieuse de savoir si l’auteur a imaginé au hasard le patronyme d’Elton, ou si c’est un clin d’œil de plus, non plus politique mais littéraire, rappelant l’amusant et ambitieux roman-feuilleton du début du siècle, qui hélas s’était arrêté à la sixième aventure du héros Moulard. (Un petit coucou au passage à ma copine pour Pas de caviar pour Moulard)
Une façon de rappeler un peu cette aventure qui avait tourné court, ou un pur hasard ?

J’ai trouvé parfois un peu lourd le narrateur, qui parle au lecteur en voix off. Mais sinon, j’ai vraiment aimé ce roman. L’histoire pleine de suspense jusqu’aux toutes dernières pages, une ironie jubilatoire, de belles réflexions sur la politique et l’économie (de quoi y réfléchir !), la chanson d’Enrico Macias qui joue un certain rôle (mais aussi un autre chanteur : Si j’avais un marteau, versus Enfants de tous pays ?), et il est même question de Descartes, comme un écho à ma lecture précédente !
En bref, n’hésitez pas ! Quelle que soit votre vision de la religion, ça vaut la peine de découvrir ce roman, et vous passerez un bon moment.

Extraits :

- S’il existe à travers l’univers des gens qui pensent sérieusement qu’on peut faire changer les autres d’avis, cela signifie qu’ils sont prêts à adopter mon propre point de vue, qui est qu’au fond, personne ne change jamais d’avis.

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Jamais ne s’était perdue l’habitude de manger de la charcuterie le Vendredi saint et de bouffer du curé les autres jours de l’année.

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Ta religion, là, c’est ça : de la mise en scène, du théâtre.
[…] ça fonctionne comme la chaîne de Ponzi.
- La chaîne de Ponzi ?
- Oui. Tu ne connais pas ça ? Le mouvement de masse qui permet d’en plumer un maximum en un minimum de temps…

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Éditeur : Quasar - 2014
331 pages - 19.00 €



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