samedi 3 octobre 2020

Le Patriarche Une saga maorie - Witi Ihimaera

Une bien belle découverte, grâce à la Masse Critique, un roman que je n'aurais probablement jamais lu sans cela. Un grand merci à Babelio et aux Éditions Au Vent des îles.

De l'humour, une famille hors du commun, la découverte d'un pays presque inconnu pour moi, et surtout, une lecture extrêmement agréable, fluide, bien écrite, un joli "page-turner".

Le Patriarche, c'est le grand-père de Simeon / Himiona. Le jeune garçon nous raconte à la première personne la vie de sa tribu hors du commun. 

Ayant découvert la Nouvelle-Zélande avec Les rives de la terre lointaine, j'étais curieuse de la voir par les yeux des Maoris.
J'ai été d'abord surprise car je m'attendais donc à voir l'histoire du point de vue d'une famille maorie traditionnelle. Mais cette famille-là est "convertie", des chrétiens pratiquants et très rigoureux, (des Mormons, mais je ne l'ai compris qu'en le lisant).
Mais on va tout de même entrer profondément dans le quotidien de cette famille maori, des traditions, avec notamment tout ce qui a trait à la tonte des moutons, et c'est très étonnant.


Une grande famille, où tout le monde est aux ordres du grand-père, même si on découvre peu à peu combien il est injuste, borné et parfois à la limite de la folie.
Seul Simeon, le fils du plus jeune fils, celui qui n'a aucun droit, mais tous les devoirs, va oser s'opposer à ce patriarche. 
On a du mal à comprendre comment des adultes, nombreux et responsables peuvent ainsi se laisser commander par un homme qui ne jure que par la famille et par Dieu. Il se croit quasiment l'envoyé de Dieu sur terre, et tous doivent s'incliner.
J'ai parfois eu envie de secouer un peu ces adultes si peu adultes finalement dans leur relation à la famille. De même qu'à la fin, j'ai été outrée (le terme est faible) par leur attitude envers leur mère.
Difficile de distinguer ce qui est dû à la tradition des Maoris de ce qui émane de leurs croyances religieuses, imposées, et de l'aura du grand-père.

Quelles qu'en soient les raisons, c'est une lecture inoubliable, drôle et émouvante, animée et agitée, hautes en couleurs.
On voit en lisant un film se dérouler sous nos yeux, la course des rivaux à l'entrée du pont, les campements pour la tonte des moutons, les compétitions, sportives ou pas ... et d'ailleurs, le film existe, tiré du livre et réalisé par Lee Tamahori (réalisateur entre autres d'un James Bond !!)
Je me suis particulièrement attachée au narrateur, si courageux face au reste de la famille, à sa petite soeur Glory, et à leur grand-mère Ramona.
Avec, dans un second rôle important, la chanson Ramona. On l'entendait souvent dans mon enfance et j'ai encore la musique en tête,  (même si je ne me souviens que du début !
"Ramona, j'ai fait un rêve merveilleux
Ramona, nous étions partis tous les deux...")

Et la dernière partie change soudain d'ambiance, pour nous faire découvrir les vérités qui nous avaient échappées, comme elles avaient échappées aux membres de la famille. D'un coup, tout se met en place, et on a envie de relire depuis le début.

J'ai un peu regretté qu'il n'y ait parfois pas de traduction des petites phrases en maori, pas toujours compréhensibles même si ça ne gêne pas la lecture, j'aurais aimé savoir, je suis curieuse !
J'ai apprécié d'en apprendre un peu sur la Nouvelle-Zélande, et notamment de croiser Apirana Ngata,  qui a réellement existé, personnage important de la communauté maori.

Witi Ihimaera est, semble-t-il, le premier romancier maori a être publié. Il a reçu de nombreux prix et c'est un auteur très prolifique, livres, films, documentaires, tout en enseignant la littérature anglaise à l'université d'Auckland.

J'ai eu aussi le plaisir de découvrir Au Vent des îles, éditeur francophone qui  publie des textes contemporains, du Pacifique et d'Océanie.

Une lecture que je vous recommande vraiment.

Extraits :

Nos enseignants étaient Pakeha. [Néo-Zélandais d'origine européenne]
[...]
Mademoiselle Dalrymple se chargeait aussi de nous faire perdre notre culture à grands coups de baguette et nous donnait cent lignes si nous parlions en maori.

***
Pendant ce temps-là, tante Sarah s'était arrangée pour bousculer l'arbitre, faire tomber ses lunettes et les piétiner. Parfait, il ne pouvait plus nuire.

***
- Honore ton père et ta mère, Simeon.
- Quand vas-tu faire un choix en fonction de moi, papa ? De ma mère et de mes soeurs ? De toi ? Et quand prendras-tu le parti de ce qui est juste ? Prendras-tu toujours son parti uniquement parce qu'il est ton père ? Et s'il avait tort ?
Mon père me dévisagea, effrayé.

***
Le rôle du Pakeha était de punir et celui du Maori d'être puni. Le processus semblait inéluctable, comme si, EUX, ils avaient toujours raison, et NOUS, toujours tort.

***
"Si tu ne poses aucune question, on ne te répondra aucun mensonge"

Lauréat du Wattie-Montana Book Award.

Traduit de l'anglais (Nouvelle-Zélande) par Mireille Vignol
Titre original : Bulibasha King of the Gypsies (1994)
1e traduction française sous le titre Bulibasha roi des Gitans, en 2009 (Même traductrice)
Éditeur : Au Vent des îles - 3 septembre 2020
449 pages - 21 €
Résumé Babelio












1 commentaire:

  1. Merci pour cette critique, qui donne envie de connaître le contenu du livre. Je note.
    Belle journée !!

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