mercredi 22 septembre 2021

Retour à Martha's Vineyard - Richard Russo

 
Une fois encore, j'ai craqué sur un titre, à cause de Martha's Vineyard !! Mais contrairement à Un été à Nantucket, pas de coup de coeur cette fois. Un avis cependant assez partagé.
De Richard Russo j'avais déjà lu Les sortilèges du Cap Cod (toujours l'attrait pour les îles du Massachusetts !) et je m'étais ennuyée.
J'ai voulu tenter celui-ci, pas seulement à cause du titre, mais aussi parce que je sais que cet auteur est très apprécié, donc je ne voulais pas rester sur un échec.

J'ai eu encore du mal au début de ce livre, pendant un long moment. Ces hommes qui tournent en rond sans voir du positif en rien, et en ne réfléchissant que sur eux-mêmes m'agaçaient.
Puis peu à peu, j'ai compris qu'il y avait une énigme là-dessous, voire plusieurs, que les choses n'étaient pas si lisses, et j'ai commencé à m'intéresser à l'histoire, à tenter de comprendre ce qui était arrivé. Je suis finalement allée jusqu'au bout plutôt avec plaisir, d'où mon avis mitigé. J'ai sans doute bien fait de persévérer !

On navigue constamment entre le passé, 1969 et 1971, et le présent.
Il est ici encore question de la guerre du Viêt-Nam, qui a marqué de façon indélébile des générations d'Américains.
1969, un tirage au sort désigne ceux qui devront partir à la guerre, et selon son rang, c'est une certitude, ou un point d'interrogation. Les plus chanceux savent qu'ils ne partiront pas.
Trois amis inséparables, un dans chaque tiers du tirage. Et une fille, dont ils se disent amis, mais sont tous un peu (beaucoup) amoureux. 
Fin des études. À chaque époque, ça signifie toujours la nostalgie de se séparer, de partir chacun vers un horizon différent, de penser qu'on ne peut se passer les uns des autres tout en sachant qu'une fois loin, les liens se distendent rapidement. C'est toujours un moment très particulier, à la fois doux, triste, mais aussi tourné vers l'avenir qui s'ouvre devant chacun.
Et pour cette génération, c'est encore plus grave, partir à la guerre, ne pas partir, s'enfuir en passant une frontière ?
Trente-cinq ans plus tard, les garçons ont bien vieilli, les chemins qu'ils ont suivi sont très différents.
Au moment où l'un envisage de vendre la maison où ils avaient passé leurs derniers moments ensemble, à Martha's Vineyard, ils s'y retrouvent tous trois, mais dans quel but ?

Simple plaisir de revoir des amis, et d'évoquer la jeunesse enfuie, ou retour en arrière pour essayer de comprendre ce qui a pu se passer.
Pour eux, ce week-end de retrouvailles sera décisif. Et le lecteur découvre peu à peu ce qu'ils sont venus chercher, et d'autres choses encore qu'on hésitait à deviner.

Extraits :

Teddy l'avait convaincue de les accompagner dans l'espoir qu'elle les aide à convaincre Mickey, au cours de ces trois longs jours, de filer au Canada au lieu de se laisser incorporer. Elle n'avait quasiment pas cessé de le supplier depuis le soir de la loterie. (Tu ne vas pas y aller, hein ? Dis-moi que tu n'es pas idiot à ce point.) Durant les mois précédant les examens, Teddy avait insisté lui aussi auprès de Mickey pour qu'il change d'avis. En vain. Comment discuter avec quelqu'un qui reconnaissait le bien-fondé de tous vos arguments ? Oui, concédait Mickey, cette guerre est à la fois stupide et immorale. Non, il n'avait aucune envie de tuer ou d'être tué, et encore moins dans une jungle étouffante, à l'autre bout du monde, pour une cause que personne n'avait pris la peine d'expliquer. Oui, émigrer au Canada était une bonne idée. Oui, il se fichait que les gens le traitent de lâche. 
« Alors, pourquoi, Mick ? l'avait imploré Teddy. Explique-moi pourquoi tu préfères faire une chose stupide et immorale, au lieu d'opter pour un choix juste et intelligent ?

***
Mais voilà le problème avec les mensonges, hein ? Pris séparément, ils ne pèsent pas lourd, sauf qu'on ne sait jamais combien il va falloir en raconter pour se protéger le premier, et bien sûr, ils s'additionnent. Avec le temps, ils se mélangent, jusqu'au jour où on se rend compte qu'ils n'ont plus d'importance en tant que tels. Mentir est devenu notre seconde nature. Et la personne à qui on ment le plus, c'est soi-même.

Titre original : Chances Are... (2019)
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Jean Esch
Éditeur : 10/18 La Table ronde - Août 2021 - 408 pages - 8.40 €
Lu en numérique via NetGalley
Grand format : Août 2020 - 24.00 €





1 commentaire: